Lovecraft et les livres maudits de son univers

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Les livres maudits dans l’univers de Lovecraft : une exploration de l’Interdit

L’univers littéraire de H.P. Lovecraft n’aurait certainement pas la même portée et le même impact imaginaire s’il n’avait pas donné naissance à un véritable travail collaboratif entre les amis et les disciples de « l’Ermite de Providence ». Ils ont non seulement continué le mythe de Cthulhu, mais ils l’ont même développé. Cet enrichissement est particulièrement visible avec l’invention de livres maudits, ces grimoires empreints de savoir interdit, qui sont venus compléter le plus célèbre des livres maudits de Lovecraft : Le Necronomicon.

De son vivant même, Lovecraft a admis ces ouvrages dans la bibliothèque ésotérique et maudite qui a nourri, et continue de le faire, l’imaginaire de ses lecteurs.

Dans une correspondance avec James Blish et Willliam Miller, datée du 19 mai 1936, il en dressait une liste sommaire : 

« Tous les mystérieux livres maudits cités dans les magazines d’histoires fantastiques sont imaginaires. J’ai inventé le Necronomicon, Clark Ashton Smith a imaginé le Livre d’Eibon, Robert E. Howard est responsable de l’Unaussprechlichen Kulten, (Richard F.) Searight a « découvert » les Fragments d’Eltdown, Bloch est à l’origine de De Vermis Mysteriis de Ludwig Prinn, comme du choquant Culte des goules, et ainsi de suite… ». Avant d’ajouter, dans une autre lettre datée du mois de juin suivant : « Oui, il est bien triste que ces ouvrages maudits et infernaux n’existent que dans la bibliothèque de la Miskatonic University (université fictive) ou dans des endroits du même genre… ».

Revenons sur ces ouvrages bien souvent éclipsé par le Necronomicon.

Le Livre d’Eibon : Le Legs des Sorciers

Originaire de la civilisation mythique d’Hyperborée, le Livre d’Eibon est un recueil de savoirs occultes et d’incantations magiques attribué à un sorcier du nom d’Eibon

Souvent considéré comme un texte compagnon du Nécronomicon, le Livre d’Eibon offre un aperçu sur des pratiques occultes et des rituels oubliés. Certaines anecdotes rapportent que ceux qui possèdent cet ouvrage sont hantés par des visions, ou des entités, cauchemardesques

Le Livre d’Eibon a également une dimension narrative fascinante : il préserve une mémoire ancienne d’une époque oubliée, reliant des civilisations préhistoriques à des connaissances perçues comme hérétiques dans le monde contemporain.

Les Cultes Innommables et Les Récits Oubliés de Von Junzt

Créé par Robert E. Howard, le père de Conan le Barbare, et prétendument rédigé par l’érudit allemand Friedrich Wilhelm von JunztLes Cultes Innommables (Unaussprechlichen Kulten en allemand) est un ouvrage qui documente les sectes et les cultes occultes adorant des entités telles que Nyarlathotep et Shub-Niggurath.

Publié pour la première fois à Düsseldorf en 1839, le livre contient des descriptions terrifiantes de rituels sanglants et des connaissances oubliées que peu osent explorer. Von Junzt, dont la fin tragique laisse planer le doute sur les dangers qu’il a rencontrés, incarne le modèle du savant maudit. Son œuvre est une collection de témoignages sur des cultes pratiqués dans des recoins obscurs du monde, où les fidèles cherchent à invoquer des puissances au-delà du bien et du mal.

De Vermis Mysteriis de Robert Bloch : Les Mystères du Ver

Créé par l’écrivain Robert Bloch, disciple de Lovecraft, le De Vermis Mysteriis est un grimoire fictif attribué au nécromancien Ludwig Prinn, un survivant des croisades, traitant de magie noire et de nécromancie.

Le De Vermis Mysteriis contient des incantations et des instructions pour invoquer des entités d’autres dimensions. Son existence, bien que controversée, a captivé l’imagination des occultistes, renforçant l’idée que le savoir interdit est à la fois tentant et mortel. Prinn lui-même aurait été brûlé comme hérétique, mais son énigmatique grimoire survit comme un témoignage de sa folie et de son génie.

Bloch est aussi l’inventeur du sulfureux Culte des Goules, attribué à un certain comte d’Erlette, petit clin d’œil malicieux à August Derleth, ami et continuateur de Lovecraft.

Les livres moins connus: d’autres fragments du Mythe

Outre ces ouvrages célèbres, l’univers de Lovecraft mentionne plusieurs autres textes maudits. Les Manuscrits Pnakotiques (Lovecraft), par exemple, sont des fragments présumément rédigés par une race extraterrestre ancienne. Ces textes contiennent des descriptions de civilisations disparues et de voyages interstellaires, offrant un point de vue étrange et troublant sur l’évolution de l’univers.

Les Fragments d’Eltdown, quant à eux, relatent des événements préhistoriques liés à des êtres venus d’autres dimensions. Leur contenu est souvent jugé incohérent, mais certains chercheurs y trouvent des indices cruciaux pour comprendre la nature des « Grands Anciens ».

D’autres ouvrages comme le Livre Noir d’Alsophocus (Martin S. Warnes), les Chroniques de Glaaki (John Ramsey Campbell) ou les Fragments de G’harne (Brian Lumley), enrichissent encore cet univers complexe et effrayant.

Les livres maudits : un portail prométhéen

Tous ces grimoires jouent un rôle crucial dans le Mythe de Cthulhu. Ils agissent comme des ponts entre le monde humain et des réalités au-delà de notre compréhension. Leur simple mention suffit à instaurer un sentiment de mystère et de terreur, et ils servent souvent de catalyseurs pour les événements tragiques des récits. Ils permettent aussi d’ancrer les récits dans une continuité à la fois littéraire et mythologique, reliant différents auteurs et époques au cœur d’un patrimoine fictif commun. Les livres maudits sont tout autant des dispositifs narratifs que des reflets des peurs profondes.

Dans l’œuvre de Lovecraft, ces livres symbolisent l’arrogance de l’Humanité à vouloir explorer l’inconnu.

Ils constituent une métaphore puissante de la soif de connaissance de l’humanité et des conséquences tragiques qui peuvent en découler. 

L’article sur Lovecraft de Sylvain Roussillon paru dans le n°49 de Livr’Arbitres

 

 

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